Débats et réflexions

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vendredi, janvier 20, 2006

L'Europe et le nombrilisme

Comment expliquer le rejet en France du traité constitutionnel européen, qui représente tout simplement un rejet de l'Europe? Deux raisons peuvent être à l'origine de cela : la peur et le nombrilisme Français.

C’est une certitude ancrée dans bien des esprits ; les Français se désintéressent de la politique. Le référendum sur la constitution européenne (29 Mai 2005) a prouvé que cette idée reçue était fausse. En effet, le taux de participation atteignit presque les 70%. Si la politique ne les intéresse plus, au moins sont-ils intéressés par l’Union européenne !

Mais au fait, qu’est ce que c’est que l’Union européenne ? Beaucoup ne saurait répondre… Ce qui explique peut-être le non majoritaire au référendum, car s'il est bien une réalité constante, c'est qu'on a peur de l’inconnu.

En conséquence, un bref rappel historique est nécessaire :

C’est en signant la CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) en 1951 que l’Allemagne fédérale, la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas fondèrent les prémices de l’Union. Le rôle premier était de rendre dépendants des peuples les uns des autres en enchevêtrant leurs productions économiques. Des peuples qui, quelques années auparavant, se combattaient. Ainsi, toutes guerres étaient impossibles puisque l’interdépendance économique scellait toutes tentations bellicistes.

Puis en 1957, après le refus Français de l’édification de la CED (Communauté européenne de défense) en 1954, fut signé par les mêmes Etats fondateurs de la CECA deux traitées, à Rome. Afin de réguler la puissance atomique, le premier instituait la CEEA (Communauté européenne de l’énergie atomique).Dans le but de moderniser l’économie du continent européen, le second créait la CEE (Communauté économique européenne), instituant ainsi le marché commun européen, permettant de disposer, en abattant les barrières économiques, d’un marché de 160 millions de consommateurs à l’époque.

Les six gouvernements écrivaient, dans le préambule de la CEE, qu’ils étaient : "déterminés à établir les fondements d’une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens." L’objectif initiale et le principal espoir, outre ceux cités ci-dessus, étaient donc toujours les mêmes ; rendre, sinon impossible, très ardue une nouvelle guerre.

La CEE a vu ses Etats membres augmenter pendant près de 30 ans ; ils étaient neuf en 1973, puis dix en 1981. Corollaire ; son traité constitutif a été plusieurs fois modifié. Ainsi sont nés de ces modifications la "coopération politique européenne" et le "système monétaire européen" dans les années 1970.

En 1986, un traité appelé "acte unique européen" (AUE) a profondément changé la physionomie de la CEE.Objectifs :- Marché commun achevé totalement au 1er Janvier 1993.- Mises sur pied de politiques dites "structurelles" en faveur des régions en retard de développement.- Etablissement de règles afin d’élaborer des politiques dans le domaine de l’environnement, de la recherche et des technologies.

Un exemple récurrent du nombrilisme français : "qu'est ce que la Constitution va m'apporter de concret dans ma vie?"

Le 7 février 1992, les ministres des Affaires étrangères et des Finances des douze États membres des Communautés européennes (six pays fondateurs plus l’Irlande, le Royaume-Uni, le Danemark, l’Espagne, le Portugal et la Grèce) signent à Maastricht le traité sur l'Union européenne (UE). Celle-ci est donc officiellement instaurée. L’Union regroupe la CECA, la CEE, et la CEEA, mais aussi deux domaines de coopération politique entre leurs États membres ; la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et la coopération dans la justice et les affaires intérieures (JAI). Les perspectives qu’avait le traité de Maastricht en matière d’union monétaire aboutiront à l’euro.

Le traité d’Amsterdam est signé en 1997 par les quinze Etats membres (pays signataires du traité de Maastricht plus Suède, Finlande et Autriche) et aboutit à peu de choses, l’essentiel (réformes des institutions européennes) ayant été repoussé faute d’accord car les égoïsmes nationaux l’emportaient de plus en plus sur une vision collégiale d’avenir.

En 2000, le traité de Nice, le dernier en vigueur, est signé par les mêmes Etats signataire du traité d’Amsterdam. Il modifie les traités antérieurs principalement sur les points suivants ;

Valeurs démocratiques : le Conseil des ministres peut adresser une recommandation à un Etat au sein duquel il existe un risque de violation des droits fondamentaux.
Institutions :
1) Parlement européen ; le nombre de sièges est augmenté, il peut atteindre 732. L’Allemagne, pays la plus peuplé de l’Union, a la première place dans le classement du nombre de sièges.
2) Conseil des ministres ; pour qu’une décision soit adoptée, il faut dorénavant une triple majorité : il est nécessaire qu’il y ait au moins 225 voix sur 345 quand en 2007 il y aura 27 Etats membres. De plus, le résultat du vote doit représenter la majorité des Etats. Enfin, un seul Etat pourra demander et obtenir que cette majorité représente au moins 62% de la population de l’UE.
3) la Commission ; elle est désormais composée d’un seul commissaire par Etat membre, les pouvoirs de son président sont par conséquent renforcés.
Coopérations renforcées : Coopérations renforcées : Des groupes d’au moins huit Etats membres peuvent renforcer entre eux la coopération dans des domaines étendues mais qui écarte « les questions ayant des implications militaires » afin d’assurer la prééminence de l’OTAN et d’éviter un renforcement d’un noyau dur d’Etats, au sein de l’UE.

Lors du référendum, les Français n'ont malheureusement pas répondu à la question posée... De fait, celui-ci à pris une tournure du genre : "Chirac ; pour ou contre ?". Or, comme la tradition en France est d’être mécontent du gouvernement en vigueur, on pouvait aisément deviner le résultat. C’est dommage.

La France dans son état actuel, c'est-à-dire minée par les "déclinologues" (pour employer le néologisme utilisé par Dominique De Villepin lors de ses vœux pour 2006 à la presse) s’est encore un petit plus enfoncée dans sa torpeur lorsqu’elle a voté non, à plus de 54%, au projet de Constitution européenne qui lui a été proposé. Un peu plus car elle traverse déjà une période de crise, de perte de confiance en elle-même. C’est par conséquent un boulet que les électeurs Français ont ajouté, avec ce vote, aux pieds de la France, déjà bien (sur)chargée…

Quelles sont les raisons de cette auto flagellation ? La réponse peut tenir en deux mots ; la peur et surtout le nombrilisme.

La peur d'abord, car les Français sont traumatisés par le chômage de masse, qui atteint les sommets de plus de 20% chez les jeunes (actifs). Ils le sont tout autant par les attentats terroristes qui resserrent leur étau sur la France, après Madrid (11 Mars 2004 ; 191 morts et plusieurs centaines de blessés) et Londres (7 Juillet 2005 ; 52 morts). Enfin, les propos alarmants sur l’état (économique diplomatique social) de leur pays les affolent. Il faut trouver un responsable à ces maux. Pour les Français, ce sera l'Union européenne.

La peur parce que l’Union s’étant élargie, les compétences ont été partagées. En conséquence, les citoyens européens, au fur et à mesure que l’Union européenne s’élargit, y voient de moins en moins en quoi elle les concerne. Au contraire, ils y voient plutôt une source de désagréments avec les délocalisations (sur lesquelles on a tant menti et exagéré) effectuées vers les nouveaux pays membres d'Europe de l’Est.

La peur parce que les décisions se prennent "là haut", à Bruxelles, sans que les citoyens ne soient informés ni consultés ; c’est l’argument de l’Europe "technocratique", argument qui a fait fureur pendant la campagne référendaire.

La peur avec l’éventuelle entrée de la Turquie dans l’Union, cela a été également brandi comme une grave menace à la cohésion de l’Europe par les hérauts du non. "Délocalisations", "Turquie", "gouvernement technocratique", on joue sur la peur et l’inquiétude, encore et toujours. Or la peur engendre le repli.

D'autre part, le nombrilisme aussi car le très grand nombre de conférences, qu’elles soient télévisées, radiophoniques, universitaires, données par les politiques afin de convaincre les électeurs de leurs positions, ont été minées par les questions ô combien nombrilistes.

Un exemple, le plus récurrent ; "qu’est-ce que ça va m’apporter de concret dans ma vie ?" s'interrogeaient certains en évoquant l’adoption éventuelle de la Constitution. La première réponse venant d’un citoyen inconscient et irréfléchi est évidemment "rien du tout".

Effectivement, si l'Europe ne serait pas une union de 25 pays liés par traités (cités ci-dessus) promouvant la paix, alors il n'y aurait pas d'apport "concret" de la part de l'Union.

Si le fait que cette même union ne serait pas une terre où règnent les droits de l’homme (l'Union les garantissant du fait de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales signée à Rome le 4 Novembre 1950 et par la proclamation de la Charte des droits fondamentaux proclamée lors du conseil européen de Nice en 2000) et par conséquent où la liberté (de penser, d’agir, de choisir librement sa religion etc.) est intouchable, alors l’Europe ne fournirait rien de concret.

Si l’Union européenne n’était pas le chantre de la démocratie, donc ne contribuait pas à enraciner celle-ci (et tous les droits qui en découlent) en Europe de l'Est du fait du désir des nations à appartenir à l'Union, dans ce cas l’Europe serait inutile aux individus.

Les citoyens de l’Union européenne jouissent tous les jours de ces droits si rares et si enviés dans le monde. Pourtant, le résultat du référendum, qui traduisait une volonté égoïste, car électorale, des pseudo-candidats à la présidentielle de 2007 d'avoir une Europe "plus sociale","moins libérale" ou encore "plus démocratique", fut sans appel ; c'est non.
Les politiques devraient faire tous les jours de la pédagogagie européenne, car les Français oublient trop souvent quel rôle elle joue et quels droits elle leur procure. En conséquence ils s'enferment dans des souhaits nombrilistes qui ne sont pas à la hauteur d'une réalisation internationale telle que l'Europe.

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Haaa l'Europe !! Quel noble idée ! Tous les peuples de notre vieux continent unis après avoir tant guerroyer les uns contre les autres. Il ne faut pas se tromper, tu as oublié une partie non négligeable du "NON" au referendum : Le "NON" souverainiste. En effet, il y a en France des personnes qui n'admettent pas de voir une partie de la gestion de leur pays partir à cette Union Européenne, au sujet duquel finalement le peuple français ne fut que très peu consulté. Pourquoi dis tu qu elle est garante de la democratie ? La constitution française l'est bien plus... L'UE est garante de la paix en Europe soit. Cela nous l'avons gagné mais au prix de la fuite d'une partie de notre souveraineté (suffit de voir les affaires autour de la TVA). De plus, il est pour moi des plus incomprehensible que l'on refuse de reconnaître le christianisme comme un des fondements de notre europe. On aura beau crier à la laïcité, je rétorquerai alors pourquoi cette peur si profonde de la Turquie ? Car elle est différente : Elle n'est pas chrétienne. N'oublions pas, le "Non" n'appartient pas à l'Europe sociale, il appartient aussi a beaucoup d'autre... Une europe : oui, mais pas à n'importe quel prix.

2:47 PM  
Blogger ben said...

Les souverainistes, oui...
Mais ce souhait de détenir la souveraineté à 100% n'est-il pas en lui-même totalement contradictoire ac l'idée d'une Union?
Comment former même un semblant d'Union si chaque pays fait absolument ce qu'il veut? Comment former une union monétaire? Un marché commun?
Je pense que si les Etats de l'Union ne déléguaient pas quelques pans de leur souveraineté, les discussions dureraient infiniment longtemps sans aboutir à quoi que ce soit.
Et quel est l'interêt d'une Union qui ne bouge pas et n'apporte rien?
D'où la nécessité de cette déléguation de pouvoir.

Les Etats-unis par exemple, qui sont des Etats fédérés autour d'un même pays, d'une même Nation, ne lèguent-ils pas certaines de leurs compétences, certains de leurs pouvoirs, à la maison blanche? (je ne connais pas le système précisément, je peux donc me tromper!)

Si ce n'était pas le cas, pour prendre l'exemple de l'Irak, seules les troupes recrutées ou sous la direction d'un Etat Républicain y seraient allées, et les troupes sous un Etat Démocrate seraient restées à la maison.

Soyons réalistes, dans ce cas on fait plusieurs Etats distincts les uns des autres et ils détiendront effectivement leur souveraineté à 100%. Mais le revers de la médaille ne sera pas des moindres ; l'affaiblissement (économique, diplomatique, militaire) sera gigantesque.

Je ne pense pas que c'est ce que nous voulons en Europe. Non, il y a une Union européenne avec déléguation logique de certains pouvoirs, ou il n'y a pas d'Union et chacun recouvre entièrement de sa souveraineté, mais il faut en supporter les conséquences.

7:27 AM  

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